Le premier jet du nouveau roman est terminé ? Bravo ! C’est déjà un bel exploit que vous avez accompli et vous pouvez être fier de vous. Il n’est pas question pour autant de se reposer sur ses lauriers : que vous le vouliez ou non, il va vous falloir passer par l’étape redoutée de la relecture et la réécriture.
Quand s’y mettre ?
Accordez-vous quand même un peu de repos entre le moment où vous avez écrit “FIN” dans le premier jet et la relecture. Prenez du recul sur votre projet pendant au minimum une semaine, voire deux. Pendant ce temps-là, n’y revenez absolument pas. Changez-vous les idées !
Vous venez de perdre passer des heures, des journées, des mois entiers dans votre projet, au détriment de tout le reste. L’herbe de votre pelouse monte jusqu’aux genoux. Vous avez au moins 3 saisons de retard sur Breaking Bad. Vous croyez encore que Gangnam Style est THE tube de l’année. OK. Il y a urgence !
Sortez, jardinez, bricolez, lisez, jouez, etc. Bref. Allez voir ailleurs que votre roman.
Et renouez un peu avec la vie sociale au passage.
L’orthographe, la syntaxe, les accords, les répétitions, toussa toussa…
Avec la relecture, vous allez probablement vous taper le front en vous disant “comment ai-je pu faire autant de fautes ?” Et encore, ce sont celles que vous, vous verrez. Vos bêta-lecteurs (j’y reviendrai plus tard) en découvriront bien d’autres. C’est normal. L’adage dit : “Oeil de lynx pour les autres, oeil de taupe pour soi.”
Déjà, en utilisant le correcteur orthographique de votre traitement de texte, une grosse partie du travail devrait être fait. Mais cela ne suffira pas. Il vous faudra un logiciel qui analysera plus finement votre texte.
Pour cela, j’utilise l’excellent logiciel Antidote. Un must-to-have, semble-t-il, dans le monde de l’édition. Et je confirme. Il analyse tout. La syntaxe, les accords, les répétitions, etc. Il existe d’autres logiciels, mais celui-ci m’apparaît le plus complet. L’analyse des répétitions en outre est très utile. Si vous ne voulez pas passer votre relecture à faire dix mille allers-retours entre votre ordinateur et le Bescherelle, je vous le recommande chaudement.
Couper, élaguer, raccourcir…
Ha ! Non ! C’est un peu long, jeune homme ! On pouvait dire… Ô Dieu ! Moins de choses en somme.
Autant vous le dire de suite, cette étape est celle qui vous fera le plus souffrir. Je parle en connaissance de cause. Je suis moi-même un adepte de l’étalage littéraire. Même mes collègues ne peuvent s’empêcher de remarquer la longueur hors-norme de mes mails professionnels.
Nous autres, écrivains, sommes fiers de notre prose, de chaque tournure de phrase travaillée, de chaque mot choisi avec soin, et même de chaque virgule posée au bon moment. Oui mais le fait est là : vous racontez avant tout une histoire. Et, oui, vous devez veiller à captiver en permanence l’attention de votre lecteur.
Une description trop longue ; une tournure de phrase tellement alambiquée qu’il faut la relire dix fois pour la comprendre ; une réflexion philosophique certes intéressante mais hors sujet, et cetera. Ce sont autant d’éléments rédhibitoires pour le lecteur.
La règle des 10%
A ce sujet, j’ai découvert une règle intéressante prônée par Stephen King himself : la règle des 10%. Pendant la relecture, il s’impose de supprimer environ 10% de son premier jet. Pour en savoir plus, je vous invite à lire cet article.
Sans le vouloir, c’est à peu près ce que j’ai supprimé de mon premier roman. Et cela a été salutaire aux yeux de mes bêta-lecteurs : mon roman a nettement gagné en rythme.
Pour la suite d’Erwan l’elfe au canard, qui sortira cet automne, je me suis rendu compte qu’il était beaucoup plus long que prévu. Je me suis alors fixé pour objectif d’en supprimer 10 à 20%, pour rester dans un volume de texte adapté à la tranche d’âge visée.
Hormis cette règle, il n’y a pas vraiment de conduite établie pour la réécriture. C’est à vous, en votre âme et conscience, de juger ce qui est pertinent dans votre texte. Mettez-vous à la place du lecteur. Demandez-vous si vous-même vous ne trouveriez pas ce passage trop barbant. Soyez honnête envers vous-même.
Et si vraiment, vraiment, vous aimez trop ce passage pour le jeter à la corbeille, pourquoi ne pas le garder dans un coin pour un autre projet ?
Les bêta-lecteurs sont vos alliés
J’ai la chance d’avoir autour de moi de nombreuses personnes toujours volontaires pour relire mes manuscrits. De la famille aux amis, ils prennent soin d’annoter chaque faute, chaque passage à revoir. Avec une consigne : être le plus objectif possible. Je préfère une critique constructive qu’un compliment. Même si des fois cela égratigne notre ego, il n’y a rien de plus efficace pour avancer. Il ne faut pas perdre de vue que n’est pas moi qui suis jugé, mais mon écrit.
Petite anecdote au passage : pendant que je dormais, ma femme s’est mise soudain à me frapper le bras à plusieurs reprises. Elle était en train de découvrir le manuscrit de L’Héritage des centaures et n’avait pas du tout aimé (mais alors pas du tout) que je tue l’un de ses personnages préférés. Moral : ne pas dormir à côté d’une bêta-lectrice.
Une particularité pour mes romans jeunesse : étant famille d’accueil, nous avons toujours beaucoup d’enfants à la maison. Je ne peux pas rêver mieux comme “bêta-auditeurs”. Je leur ai lu tous les soirs un chapitre du prochain tome d’Erwan l’elfe au canard, entraînant parfois des échanges qui m’ont permis de déterminer quel passage était trop compliqué pour eux ou quel mot leur était inconnu, qu’est-ce qui leur faisait rire ou, au contraire, les endormait.
Vous verrez : rien n’est plus gratifiant que de voir une bande d’enfants rire aux éclats en vous écoutant lire un passage particulièrement comique. Là, on peut se dire : mission accomplie.
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